Voyage

« Donc, dites tout ce qui vous passe par l’esprit. Comportez-vous à la manière d’un voyageur qui, assis près de la fenêtre de son compartiment, décrirait le paysage tel qu’il se déroule à une personne placée derrière lui. » S. Freud in La technique psychanalytique, Le début du traitement, 1913.

C’est en 1913, que S. Freud use de la métaphore ferroviaire comme voyage intérieur pour expliquer à ses analysants la méthode psychanalytique et énoncer la règle fondamentale de la libre association d’une part et de la libre écoute et de l’attention flottante, d’autre part.

C’est d’ailleurs au cours d’un voyage réel en train en 1897 en Italie vers le cœur de l’art qu’il pose les fondements de la psychanalyse. Le train devient son mode de transport et de transfert vers l’art et vers l’inconscient. Il associe en quelque sorte l’art de voyager et l’art de psychanalyser, le voyage intérieur n’étant accessible que par des boucles et des détours parfois sinueux, des égarements aussi.

De quelle manière un analysant va-t-il évoquer le paysage ? Sera-t-il mobile, changeant, coloré, contrasté ou plutôt répétitif et figé ? Quelles images apparaîtront ?

Le voyage est une expérience de séparation et de transformation interne qui se produit à travers la rupture spatiale et temporelle que crée, par exemple, un voyage en train. Il comporte sa part d’excitation et d’angoisse telle une figure du désir et de la pulsion susceptible d’animer et de contrarier tout un chacun. Voyager suppose de se mouvoir vers l’ailleurs, vers d’autres lieux qui se créent avec le déplacement.

Se mouvoir vers une terre étrangère, l’inconscient, dans le voyage introspectif.

L’expédition intérieure est une sorte de dégagement et peut être d’exil. Se dégager du familier, d’une histoire, d’une enfance, d’un passé, d’une lignée pour être en mesure d’y revenir sans les entraves.

Le voyage est proche aussi, sur certains points, du travail de deuil et de perte permettant l’accès à une possible passagereté et à de nouveaux lieux psychiques. Proche de l’expérience d’un lâcher prise permettant de vivre la fugacité d’un mouvement, d’un moment sans y rester mélancoliquement englué.

Et pourtant, la psychanalyse demande du temps et travaille avec le temps car l’inconscient ne se saisit pas en temps réel dans l’immédiateté et l’instantanéité dont notre époque est friande.

L’inconscient se saisit avec le temps, un travail de traduction, un processus de deuil créant l’histoire et l’historique, le passage de l’original au traduit, de l’image aux mots, du visuel à l’oral.

Une psychanalyse est un don de temps et de délai, de suspension, d’attente mais aussi d’indispensable après-coup.

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